KEMAL, Orhan
[TURQUIE] (Ceyhan/
Adana, 1914 – Sofia, Bulgarie, 1970). Pseudonyme de Mehmet Raþit Öðütcü,
il a également publié sous les noms de Hayrullah Güçlü, Orhan Raþit,
Raþit Kemali, Reþat Kemal, Rüþtü Ceyhun, Ülker Uysal et de Yýldýz Okur.
Son père, député de Kastamonu et fondateur du Parti socialiste populaire
est obligé de se réfugier en Syrie en 1930. Orhan Kemal l’y suit, ce qui
l’oblige à interrompre ses études. Il revient en Turquie après un an
d’exil et s’établit à Adana où il travaille à partir de 1932 dans des
filatures de coton ainsi que dans des fabriques de textiles. Après un
long séjour en prison, vit de sa plume et, depuis ses débuts en 1941, il
a publié une quarantaine de livres (recueils de nouvelles, romans,
pièces de théâtre, mémoires).
« Un autre écrivain marquant de la génération des années 1950 est sans
nul doute Orhan Kemal dont les premiers romans feront découvrir les
paysans déracinés, les journaliers, les nouveaux venus à la ville, Avec
son roman publié en 1954 Sur
les terres fertiles il
suivra le passage des hommes d’une condition à une autre. Avec Orhan
Kemal s’amorcera la description de la machine, de la grève, de
l’aliénation. Kemal Tahir et plus encore Orhan Kemal seront marqués (ils
ne sont d’ailleurs pas les seuls) par la leçon du grand poète Nâzim
Hikmet, leur compagnon de prison dans les années 40. » (Guzine Dino,
« Soixante ans de roman turc », Les
Temps modernes, n°456-57, 1984)
ANTHOLOGIES / REVUES
* « Accouchement dans les champs », nouvelle, dans L’Âme
turque à travers les nouvelles, Istanbul, Zelliç Basimevi, 1953.
* « À parts égales », nouvelle, dans Orient n°47-48,
Paris, 1968.
* « Grève », nouvelle, dans Correspondance
d’Orient / Études vol.
19-20, Bruxelles, 1971-72.
* « Nazim Hikmet à la prison de Brouse », extrait de Nazým
Hikmet’le Üç Buçuk Yýl [Trois
ans et demi avec Nazim Hikmet] (1965), traduit par Marie-Josephe Barron
et Garros Manougian, dans Europe n°547-548,
Paris, novembre-décembre 1974.
* « Le grand sommeil », nouvelle traduite par François Georgeon, dans Europen°655-656,
Paris, 1983.
LIVRES (Traductions)
— Sur les terres fertiles (Bereketli
Topraklar Üzerinde, 1954), roman, traduit du turc par Jacqueline
Bastuji et l’auteur. [Paris], Éditions Gallimard, « Du monde entier »,
1971, 384 pages, épuisé.
Chaque année des dizaines de milliers de paysans sans terres descendent
chercher du travail sur « les terres fertiles » de l’Anatolie
méridionale et dans les usines d’Adana. Le roman d’Orhan Kemal est
l’odyssée de trois d’entre eux, Youssouf, Hassan et Ali, en quête
d’embauche, et immédiatement plongés dans un monde à la fois merveilleux
(c’est « la ville » et ses pauvres richesses) et terrifiant. Monde où
l’exploitation prend des formes d’une brutalité inouïe – où l’employeur,
« l’agha », est un seigneur inaccessible, où tous les contremaîtres sont
des marchands d’esclaves qui prélèvent un. impôt sur la paye d’ouvriers
mourant de faim, seulement soutenus par le hachisch, où les femmes sont
vouées à devenir des prostituées (elles accouchent régulièrement de leur
premier enfant « avant que leurs seins aient eu le temps de se
développer »)... Hassan meurt très vite, de maladie. Ali le lutteur,
principal personnage du livre, naïf et pur, aimé des femmes, mourra lui
aussi, la jambe broyée par une batteuse sous les yeux de « l’agha » qui
refuse de le conduire à l’hôpital pour ne pas salir sa voiture. Seul
Youssouf « réussit ». Il revient un jour au village, portant un veston,
une valise à la main et ayant réalisé son rêve : l’achat d’un réchaud à
pétrole.
L’histoire nous est livrée presque entièrement sous forme de dialogues,
sur un rythme qui traduit à merveille la mentalité digne et prudente,
peureuse et forte, coupée de brusques et puissantes poussées d’érotisme
et d’émotion amoureuse, d’un monde qui, en Occident a disparu depuis
longtemps, un monde de Moyen Âge.
L’extraordinaire relief de la réalité,humaine présenté dans ce livre
semble ainsi tenir beaucoup moins, pour nous, au dépaysement dans
l’espace qu’à une sorte d’éloignement dans le temps. Ce roman est celui
d’un univers qui ne sera sans doute plus jamais décrit, mais qui a été
durant des siècles celui de toute l’humanité – en des temps où le roman
précisément, qui aurait pu en rendre compte, n’existait pas encore. [Quatrième
de couverture]
— L’Inspecteur des
inspecteurs (Müfettiþler
Müfettiþi, 1966), roman, traduit du turc par Jean-Louis Mattei.
[Ankara], Kültür ve Turizm Bakanlýðý Yayýnlarý / Publications du
Ministère de la Culture et du Tourisme de la République de Turquie,
« Série Art-Littérature », 1995, XI-398 pages, épuisé.
— L’Escroc (Üç
Kaðýtçý, 1969), roman, traduit du turc par Jean-Louis Matteý.
[Ankara], Kültür ve Turizm Bakanlýðý Yayýnlarý / Publications du
Ministère de la Culture et du Tourisme de la République de Turquie,
2002. |